Un espion ordinaire : Benedict Cumberbatch dans un thriller remarquable

Le film Un Espion Ordinaire de Dominic Cooke avec Benedict Cumberbatch

Il n’a pas les scènes de castagne de James Bond ni l’humour de Johnny English. Pourtant, Un espion ordinaire - dont la réalisation a été confiée à Dominic Cooke à qui l’on doit Sur la plage de Chesil avec Saoirse Ronan - fera bientôt figure de modèle pour les bons films d’espionnage.

Et pour cause : Benedict Cumberbatch y délivre une performance exceptionnelle et son scénario, tiré d’une histoire vraie, va rendre accro les cinéphiles adeptes de thrillers sous haute tension. 3 bonnes raisons de réserver sa place...

Parce que c’est un vrai bon film d’espionnage

Dans la lignée du Pont des Espions de Spielberg avec Tom Hanks, Un espion ordinaire s’affirme en vrai bon film du genre, également inspiré d’une histoire vraie. Celle de Greville Wynne (Benedict Cumberbatch), un efficace commercial anglais à fort potentiel persuasif qui se retrouve - un rien forcé par le MI6 et la CIA - à devoir jouer les espions entre Londres et Moscou en pleine Guerre Froide.

Son complice ? Oleg Penkovsky (attachant Merab Ninidze), un traître du parti communiste de Nikita Khrouchtchev prompt à délivrer des informations sur la frappe nucléaire prévue à Cuba. Les deux hommes se lient d’une vraie amitié, et cette bromance à haut risque bouleverse bientôt leurs vies...

Pour Benedict Cumberbatch

Si le casting général fait honneur à la justesse du scénario avec notamment Rachel Brosnahan (The marvelous Mrs Maisel) en agente de la CIA - dont la présence adoucit ce paysage presque exclusivement masculin - c’est bien Benedict Cumberbatch qui s’offre un de ses rôles les plus poignants. Mention spéciale pour ses scènes d’emprisonnement au goulag, qui présentent l’avilissement d’un prisonnier déterminé à survivre.

Nommé aux Oscars en 2015 pour Imitation Game, l’acteur irradie de sa grâce toute anglaise et d’un jeu acquis grâce à des débuts de carrière au théâtre. Prenez le temps surtout de vous imprégner de sa voix extraordinaire, bénie par les plus grands cinéastes, et qui lui a valu d’interpréter le dragon Smaug dans la trilogie du Hobbit de Peter Jackson.

Pour la tension permanente

À partir du moment où Greville accepte la mission, plus de place à la légèreté. Alors que sa femme flaire à tort une liaison, lui se faufile entre les mailles du filet lors de ses incessants voyages en avion. Chaque trajet est une aventure en soi, avec des documents à planquer dans la valise et des infos à récupérer dans des lieux discrets.

L’adrénaline atteint évidemment son climax quand les russes commencent à douter de ce curieux manège. Un inévitable engrenage qui pousse les deux compères dans leurs retranchements, cernés par tout un système, risquant leurs vies pour se protéger mutuellement… Même si leur histoire vraie se trouve partout sur Internet, on vous conseille de ne pas trop en savoir en avance pour garder le plaisir d’un suspense qui accroche l’attention de bout en bout.

extrait de un espion ordinaire avec Benedict Cumberbatch

En salles le 23 juin.

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Nomadland

On devait déjà à Chloé Zhao Les chansons que mes frères m’ont apprises présenté à Sundance en 2015 et l’excellent néo-western The Rider. La réalisatrice américaine délivre une prouesse avec Nomadland, un road-movie social qui vient juste de rafler les Oscars du meilleur film, de la meilleure réalisatrice et de la meilleure actrice pour l’incomparable Frances McDormand. Rien que ça. 3 raisons de foncer voir ce vrai beau film.

1 - Parce que Frances McDormand est vraiment la meilleure actrice

Elle n’aura pas volé son troisième Oscar après 3 Billboards et Fargo. Chouchoute des frères Coen et du tout Hollywood en général, Frances McDormand trouve dans Nomadland l’un des rôles les plus forts de sa carrière déjà exceptionnelle, entourée d’acteurs non-professionnels qui confèrent au film un aspect documentaire et finalement assez pédagogique.

Dans les baskets de Fern, une ouvrière du Nevada qui a perdu mari, job et maison suite à la crise de 2008, elle s’avère d’une pureté éclatante à bord de son van, éprise de liberté, traversant les vastes plaines au gré des rencontres et petits jobs saisonniers qu’elle accomplit toujours sans rechigner, du ménage des toilettes au ramassage de betteraves, sans jamais faire de vagues.

2 - Pour ce qu’il dit de la société américaine

Isolée, veuve, sans enfants, Fern personnalise et bichonne le van dans lequel elle dort et voyage. Profondément antisystème et fort mal à l’aise dans cette société qui trouve normal de s’endetter toute une vie pour s’offrir un toit, son mode de vie pas si marginal lui convient. D’autant plus qu’elle noue des liens très fort dans une communauté de nomades animée par un monsieur doué pour trouver les mots qui apaisent, jamais avare de conseils pour améliorer son quotidien sur les routes.

Malgré la solitude des repas et des nuits, Fern est nourrie par un espoir : celui des rencontres et de l’imprévu, loin du métro-boulot-dodo qui lisse les destins et anéantit le libre-arbitre. En somme, chacun est invité à réfléchir sur la place qu’il veut s’offrir, et le choix devient un luxe.

3 - Pour la superbe photographie

Le désert rocailleux à perte de vue, des pierres qui se ramassent et s’offrent, le coucher du soleil sur la plaine, la perspective de routes infinies, les rivières où l’on se baigne nu·e… Chloé Zhao parvient à capturer la beauté d’un décor naturel, respecté et admiré par les nomades plus que quiconque connectés à la terre. Une terre qui accepte de leur faire de la place, qui leur offre l’espace suffisant pour la découverte, promesse de surprises et d’éblouissement.

En salles le 9 juin

petite maman

Son charmant conte initiatique enchante cette “rentrée” cinéma. 3 bonnes raisons de prendre sa place pour Petite Maman de Céline Sciamma, en salles le 2 juin.

1 - Pour la délicatesse de son étonnante histoire

Difficile de trouver quelconque critique négative de son nouveau film. Céline Sciamma enchaîne les coups de cœur avec son onirique Petite Maman, véritable plongée intime dans le temps, ôde à la transmission maternelle et à l’enfance. Après le décès de la grand-mère adorée et une très belle scène d’adieux dans un Ehpad (qui résonne particulièrement avec l’actualité), il faut aller vider sa maison.

La maman disparaît soudainement, mais le père (Stéphane Varupenne de la Comédie-Française) continue à trier les souvenirs. Nelly, 8 ans, ne comprend pas ce départ et se réfugie dans la forêt environnante. Elle y rencontre sa propre mère au même âge, “petite maman” devenue partenaire de jeu et surtout confidente. Un voyage dans le temps fantastique qui crée la possibilité d’un partage inespéré.

2 - Pour le réalisme magique de Céline Sciamma

Son Portrait de la jeune fille en feu avec Adèle Haenel était plus ambitieux (costumes, décors), et pourtant Petite Maman a ceci de magique qu’il semble si simple et pourtant travaillé avec tous les outils du cinéma mis à sa disposition. Elle emprunte à Miyazaki ses forêts enchantées (celle du film est d’ailleurs un lieu d’enfance de la réalisatrice), place précisément chaque objet, du bibelot dans la maison à la souche d’arbre, pour ne rien laisser au hasard et offrir le champ libre à l’émotion.

Cette précision, qui lui a valu d’être sélectionné en compétition au Festival de Berlin, repose aussi sur un montage-image brillant qui perd le spectateur entre la réalité et la possibilité d’un rêve où les personnages apparaissent et disparaissent comme par enchantement. La forêt sépare d’ailleurs les deux unités de temps en reproduisant la même maison face à face, séparées par un chemin, histoire de brouiller davantage les pistes...

3 - Pour sa réflexion pas si naïve

Sous ses airs de ne pas y toucher, Petite Maman pose de vraies questions en mettant au même niveau les deux fillettes, sans aucun rapport de force. Le nouveau mythe de Céline Sciamma pousse à la réflexion sur soi, quant à la possibilité de grandir et se consoler sans rivalité sentimentale.

Parce qu’au fond, on pourrait aussi bien s’inspirer de l’engagement total des enfants pour devenir meilleur·e, dans un désir infini d’apprentissage. Et qui de plus pur, profond et dépendant qu’un enfant pour déposer son regard franc et solidaire sur la réalité, avec ses mots d’évidence ? Un sujet qui sied définitivement à la réalisatrice, après le délicat Tomboy qui suivait un petit garçon né dans le corps d’une fille.

En salles le 2 juin

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