©Mark Leckey ©Audrey Tautou ©Summer Wheat
Pas besoin de faire la queue des heures devant les musées les plus courus de la capitale pour s’offrir un shoot de culture. Ça bourdonne du côté des galeries d’art et des tiers-lieux, qui présentent en ce moment des expos gratuites et ultra-inspirantes. Au programme : un accrochage sur et par la star Audrey Tautou, l’art trippant de Mark Leckey, les sculptures fabuleuses de Jeanne Vicerial, les photos de l’humaniste Gérard Castello-Lopes ou encore les tableaux pop à souhait de Summer Wheat. On vous emmène ?
La plus star
“Succès : résultat heureux obtenu dans un travail. Faveur, audience accordée par le public”, annonce d’emblée cette expo inattendue. Jusqu’au 10 décembre, Audrey Tautou s’amuse de son image de vedette au Quai de la Photo ! Car ce que l’on sait peu, c’est que l’actrice, passionnée de photographie, adore également passer de l’autre côté de l’objectif. Autoportraits, lettres de fans et autres polaroïds rythment cet accrochage qui raconte son parcours de star de cinéma avec humour et autodérision.
Après le film culte de Jean-Pierre Jeunet sorti en 2001, le fabuleux destin d’Audrey Tautou bascule. Elle devient une véritable star, recevant d’étonnants cadeaux de fans, lettres et objets insolites. La vedette joue ici de son statut survenu du jour au lendemain, interrogeant la place que prend ce dernier dans sa nouvelle vie. Ainsi, elle se dévoile de l’autre côté de la caméra, nous cédant l’autorisation de découvrir une part de son intimité avec quelques autoportraits sincères, des lettres touchantes et parfois déjantées d’admirateurs, certaines de ses propres photos d’anonymes – tous pris de dos – ou encore un mur de polaroïds affichant les dizaines de journalistes qui l’ont interviewée durant sa carrière. Un voyage à travers la femme et l’actrice, lien dorénavant quasi indissociable, et sur lequel il est nécessaire de jouer pour se ré-approprier une identité.
Superfacial, Audrey Tautou, du 5 juin au 10 septembre 2025 au Quai de la Photo. Ouvert tous les jours, du jeudi au samedi de 12h à 2h et du dimanche au mercredi de 12h à 1h.
© Audrey Tautou
La plus extatique
C’est l’expo rêvée des éternels perchés ! Artiste majeur de la scène contemporaine, Mark Leckey était très attendu pour cette exposition au Lafayette Anticipation. Must-go absolu, As above, as below expose une partie de son art si trippant, présent dans d’autres collections grandioses, à l’instar de celles du TATE Museum ou du Centre Pompidou. Un voyage artistique immanquable, qui se vit davantage comme une expérience que comme un déchiffrage, à découvrir jusqu’au 20 juillet.
Mark Leckey a percé dans le monde très select de l’art contemporain avec son oeuvre video Fiorucci Made Me Hardcore, compile pionnière de VHS et vidéos cassettes de soirées issues des contre-cultures britanniques, bien avant que ce genre de contenus ne soit numérisé, aesthétisé et diffusé sur Internet. Depuis, son travail avant-gardiste qui croise vidéo, son mais aussi pop et sous-cultures, sublime la banalité du quotidien et enchante les matériaux de la vie de tous les jours. À la frontière de l’immersion, As above, as below présente un pont, un arrêt de bus, des publicités pour la sécurité routière, des réverbères vintage ou un parc d’attractions comme des expériences extatiques, inspirés par les sentiments et les souvenirs de l’artiste lui-même. Ainsi, on jalonne entre les œuvres qui, volontairement, balancent un too much d’informations pour nous submerger d’émotions vertigineuses. Le but ? Retrouver les sensations exaltantes que l’on acquiert avec la religion, les réseaux, la danse, la musique… On adore particulièrement ses représentations de l'iconographie médiévale, retravaillées avec les codes numériques modernes, qui nous questionnent sur ces visions extatiques du monde à travers les différentes époques. Une suspension dans le temps, où terre-à-terre et mysticisme se fondent comme si l’on était en pleine élévation pour rendre l’ordinaire onirique. Gare à la redescente…
Exposition « As Above So Below » de Mark Leckey, jusqu’au 20 juillet, à Lafayette Anticipations, 9 rue du Plâtre, Paris 4e. Ouvert du mercredi au dimanche de 11h à 19h.
© Alessandro Raimondo © Mark Leckey
La plus couture
Déjà passée par la Villa Médicis et le Palais de Tokyo, la Française Jeanne Vicerial investit de ses impressionnantes créations la Galerie Templon Beaubourg jusqu'au 19 juillet, transformant ce lieu d’art en une chambre intime et mystique accueillant les représentations du corps féminin. Attention, talent brut ! Crush ultime pour la géniale Jeanne Vicerial, artiste plasticienne passionnée de mode et de design. Clairement en train d’inventer la mode futuriste avec sa technique exceptionnelle du “tricotissage”, elle signe son retour en France avec Nymphose, exposition de ses dernières sculptures textiles.
Elle y déploie son univers de fils noirs aux détails minutieux, et sur lesquels on peut s'attarder pendant bien longtemps. Nymphose, c’est l’aboutissement de deux ans de réflexion autour de la métamorphose et des représentations du corps féminin, objet de sacralisation autant que de médisances à travers les siècles. Au mur, des “sex-voto”, représentations d’organes féminins tissés en un seul fil et garnies de pépites d’or et d'argent, explorent le tabou autour du corps. En face, les sculptures, véritables nymphes dressées dans une vibe claustral, dépeignent les étapes de la vie des femmes, entre maternité et premières étreintes, jusqu’à la mort. Au fond de l'installation, un sublime cadavre fleuri, croisement subtil d’Ophélie de Jean-François Millais et des œuvres du grand Pierre Soulages. Une chose est certaine, l’artiste devait être une grande fan de ce dernier (as she should) et a d’ailleurs même été invitée à exposer en 2024 au Musée Soulages de Rodez. La classe.
Nymphose, Jeanne Vicerial, jusqu’au 19 juillet à la Galerie Templon Beaubourg. 30 rue Beaubourg, Paris 3e. Ouvert du mardi au samedi de 10h à 19h.
© Laurent Edeline
La plus père & fils
En plein Marais, le Franco-portuguais Gérard Castello Lopes s’est fait une place douillette à la Galerie Polka, entre la grande Françoise Huguier et Bernard Cantié. Une redécouverte du talent de ce photographe, l'un des représentants de la photographie humaniste, orchestrée par son fils, le journaliste David Castello-Lopes, et à admirer jusqu’au 26 juillet. Car si aujourd’hui David Castello-Lopes est plus connu pour son format Small Talk sur Konbini, ses chroniques France Inter ou ses chansons humoristiques, il l’est moins pour son père, photographe pourtant reconnu du XXe siècle.
Le fils a fouillé dans ses archives afin d’en dépoussiérer quelques clichés, parfois comparés à ceux du grand Henri Cartier-Bresson. Avec son regard humaniste et ses compositions structurées avec rigueur, Gérard Castello Lopes saisit la réalité dans des compositions géométriques précises et dans des instants de vie sublimés par son coup d'œil cinématographique. Parmi ses nombreuses photos, beaucoup étudient et magnifient la vie des habitants de Lisbonne dans les années 1950. Notre coup de cœur : le portrait de ces deux jeunes garçons qui jouent au foot, rendu grandiose par son aspect tout droit sorti d’un grand film vintage et par son aura spirituelle. Commenté par son fils, dépositeur de sa mémoire, son travail déborde de vie et de sentiments. Le regard d’un fils sur les yeux de son père à découvrir à tout prix entre les autres accrochages passionnants de la galerie !
Gérard Castello Lopes, Le regard de mon père. Du 26 mai au 26 juillet à la Polka Galerie, Cour de Venise, 12 rue Saint-Gilles, Paris 3e. Ouvert du mardi au samedi de 10h à 19h.
© Gérard Castello-Lopes
La plus vibrante
Pour l’arrivée des beaux jours, l’artiste américaine contemporaine Summer Wheat revient pour une seconde fois à la galerie Zidoun-Bossuyt de Paris afin de (re)découvrir, jusqu’au 19 juillet, ses patchworks follement colorés, entre peinture et tissage, et encensés par la presse artistique. Une mise en bouche de la saison estivale qu'il serait fou de louper…
Impossible de ne pas se sentir comme envoûtés face à ces toiles immenses et éclatantes de couleurs ! Dans cette nouvelle exposition des tableaux de l’artiste Summer Wheat, reconnue et exposée à travers le monde, les figures féminines se transforment en cavalière à la poursuite de papillons, essaient en vain d’attraper les perles de pluie à travers leur filet troués, quand les étoiles, elles, se confondent parfois avec les abeilles… On ose s’approcher de ses peintures afin de mieux les comprendre et y déceler du relief, puisque sa technique de prédilection consiste à passer de la peinture à travers un grillage en alu. Au-delà de sa technique unique et innovante, l’artiste a su peaufiner depuis des années un style acidulé, dynamique et profondément personnel. Ici, les toiles nous remémorent une enfance tendre et offrent une représentation fun et quelque peu ingénue de visions poétiques. L’accrochage rêvé pour celles et ceux qui souhaitent retrouver le goût des vacances ensoleillées de leur enfance, ou qui sont restés de grands rêveurs.
SUMMER WHEAT, Sun Up, Sun Down, jusqu’au 19 Juillet 2025 à la Galerie Zidoun-Bossuyt Paris. 51 rue de Seine, Paris 6. Ouvert du mardi au samedi de 10h à 18h.
© Summer Wheat
La plus globe-trotter
Récompensé à plusieurs reprises, le photojournaliste italien Paolo Pellegrin a même un album photo consacré à son travail par Reporter Sans Frontières. En deux mots : la classe. Dans le Marais, à l’atypique Galerie de l'Instant, l'artiste fait escale pour une jolie rétrospective de ses photos.
Plus que de simples photos de reportages, on décèle dans son travail un œil d’artiste hors-pair. Véritable nomade, on voyage avec lui en Grèce, au Japon, en Suisse ou encore à New York à travers ses photos urbaines et ses paysages à couper le souffle. Nos coups de cœur : sa photo d’un marché à Cuba à l’ambiance Edward Hooper, ou celle de New York City en 2011, qui dans les contrastes de lumière sur les bâtiments nous rappellerait presque la pochette d’Animals de Pink Floyd… Et en parlant de pochette d’albums mythiques, la galerie regorge de pépites des anciennes expos dans son sous-sol à (re)découvrir. Trop trop : on en profite pour voir la photo/pochette de Melody Nelson de Gainsbourg aux côtés d’autres clichés hyper glamour des 60’s / 70´s…
Galerie de l’Instant, jusqu'au 18 juin, 46 rue de Poitou, Paris 3e. Ouvert du lundi au samedi de 11h à 19h et le dimanche de 11h à 18h30.
©Christopher Anderson ©Paolo Pellegrin
La plus nordique
L'institut suédois, en plein cœur du Marais propose un topissime voyage artistique 2 en 1, entre la grande peintre Barbro Östlihn, et une rétrospective du commissaire révolutionnaire des musées Pontus Hulten.
Impensable de ne pas découvrir le travail de l'artiste Barbro Östlihn. Cette peintre avant-gardiste a connu le plein essor du mouvement pop-art, et fut une des seules à être exposée à Londres en 1969 dans l’expo dédiée à ce mouvement artistique. La visite commence par une première présentation de sa période new-yorkaise, puis on découvre les œuvres mythiques et l’éternelle fascination de l’artiste pour les détails architecturaux, mais aussi plein d’esquisses et de photos. Sa première rétrospective en France est à découvrir absolument. On passe faire un tour par la même occas’ à l’expo Keep Smiling ultra design de Pontus Hulten, commissaire d’art suédois et premier directeur du centre Pompidou. Affiches carrément aesthetics et modernes d’expos mythiques sont au rendez-vous. Alors, parés pour une échappée en Suède ?
Barbo Ostlihn à l'Institut Suédois, jusqu'au 20 juillet, 11 rue Payenne, Paris 3e. Ouvert du mardi au dimanche de 12 à 19h et le jeudi de 12h à 21h.
© Barbro Östlihn ©Institut Suedois
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